DALI : aujourd’hui pour demain ?

Encore en 2017, préconiser l’usage du protocole DALI, dans des applications muséographiques, ne faisait aucun doute ! Qu’en est-il aujourd’hui alors que se développent bon nombre de protocoles de communication ? Avant de répondre à cette interrogation, il convient de préciser trois points : définir les besoins au niveau d’un projet ; estimer sa durée, de sa conception à sa réalisation ; appréhender les avancées technologiques jusqu’à sa mise en œuvre effective.

En muséographie, aux besoins de qualité, de fiabilité et de maniabilité du matériel proposé, il faut y ajouter une facilité de mise en œuvre en raison des changements répétés des expositions. Rappelons que, dans un espace muséal, l’éclairage d’exposition participe à la mise en espace tout en répondant à des exigences de confort visuel et à un niveau d’éclairement permettant une bonne perception. Sans omettre la protection des œuvres sensibles aux rayonnements optiques en assurant une exposition lumineuse la plus faible possible. En conséquence, il ne convient d’exposer les objets à la lumière que s’ils sont admirés car il est inutile de les éclairer s’il n’y a personne pour les apprécier ! Aussi, importe-t-il de créer divers scénarios d’éclairage incluant la détection de présence ou l’interaction directe du visiteur.

Musee Rodin, Paris. Hotel Biron 03/11/2015 L'hotel Biron de la rue de Varenne dans le VIIe arrondissement a Paris.  Le musee Rodin assure depuis 1919 la conservation et la diffusion de l oeuvre d Auguste Rodin (1840-1917).  On y conserve des collections d une grande diversite car Rodin etait collectionneur en plus d etre artiste.  Le musee presente principalement des sculptures, les dessins, peintures et photographies anciennes ne pouvant etre exposes de facon permanente pour des raisons de conservation. Avec 700 000 visiteurs par an, le musee Rodin compte parmi les musees franccais les plus importants. Situe a l angle de la rue de Varenne et du boulevard des Invalides, (7e arrondissement de Paris), l’hotel Biron a connu plusieurs proprietaires depuis l achevement de sa construction en 1730. La duchesse du Maine, belle fille de Louis XIV, le marechal Biron, qui donna son nom a la demeure, la legation pontificale, l ambassade de Russie ou encore la Societe du Sacre-Coeur de Jesus, congrgation religieuse fondee par Madeleine-Sophie Barat jusqu’en 1905, date de la separation de l'Eglise et de l'Etat. L hotel est a ce moment dans un etat alarmant. On autorise alors plusieurs artistes a etablir leurs ateliers dans le batiment.  C est ainsi que Rodin, Jean Cocteau, ou encore Henri Matisse font leur entree a l hotel Biron. En 1911, l Etat achete le domaine tandis que Rodin decide de lui ceder ses collections a la condition qu un musee soit consacre a son oeuvre, au sein de l hotel Biron. Le projet aboutit en 1919, mais Rodin, mort deux ans auparavant, ne pourra assister a l ouverture du musee. L hotel Biron est entoure d un domaine exceptionnel, en plein coeur de Paris.
© Patrick Tourneboeuf / OPPIC / Tendance Floue

Musée Rodin, Paris.

La rénovation achevée en 2015 du musée consacré au sculpteur a nécessité le développement spécifique d’un système électronique de pilotage et d’indexation via le protocole Dali des sources d’éclairage, notamment des projecteurs LED IYon Tunable White développé par Zumtobel, à température de couleur dynamique. Signée Stéphanie Daniel, cette conception repose sur la variation de l’intensité et de la température de couleur selon les conditions extérieures.

DALI AUJOURD’HUI CONCURRENCÉ

Dans ce contexte, un protocole de gestion de l’éclairage s’avère indispensable. Le protocole filaire DALI (Digital Addressable Lighting Interface), avec ses 64 adresses de base, dont 8 dédiés aux capteurs, ses 16 groupes de ballasts d’éclairage assurant la programmation de 16 scènes scénarii, correspond largement aux besoins muséographiques, bon nombre de fabricants de matériel le proposant.

Toutefois, de la phase du concours portant sur un projet jusqu’à sa réalisation, il peut facilement s’écouler deux ou trois ans, durée suffisamment longue pour qu’émergent de toutes nouvelles technologies dont l’évaluation nécessite de deux à trois nouvelles années supplémentaires. Aussi, lorsque le projet sort, la technologie choisie date au minimum de quatre à cinq ans. Ce qui est largement le cas pour des protocoles tels DMX (1990)1 et DALI (2001). Tandis que, depuis quelques années, de nouveaux protocoles sont proposés (PoE-Power over Ethernet, Bluetooth, Zigbee, etc.) qui, sans pourtant attendre leur pleine maturité, s’impliquent déjà dans bon nombre de projets.

DE NOUVELLES SOLUTIONS SE DÉVELOPPENT

Ces nouveaux protocoles, loin d’être encore normalisés, présentent toutefois des performances s’améliorant de jour en jour et évoluant constamment. Certains vont même jusqu’à remettre en les pratiques traditionnelles. Citons, notamment, le Power over Ethernet (PoE) en cours de développement (voir notamment LUX 304, novembre – décembre 2019, p. 24). Ces nouvelles perspectives, comme le passage aux 48V, demandent une nouvelle conception des luminaires et un gain en flux, chaque ligne étant limitée à quelques centaines de watts. « Plus intéressants, encore aujourd’hui, sont les protocoles radio sans fil, mieux adaptés aux installations existantes alors qu’il n’est pas si simple au Wifi de s’intégrer dans une installation existante, voire de créer une liaison supplémentaire », considère Jean-Jacques Ezrati. À ce propos, que dire aujourd’hui de ces protocoles ? « Pilotant les sources et des luminaires du même fabricant, ils sont loin encore de correspondre aux besoins de l’éclairage d’expositions », poursuit-il. Pour le Bluetooth, l’investissement reste limité puisqu’il ne demande pas de « tirer » des câbles supplémentaires. « Néanmoins, les choses ne sont pas aussi simples que celles avancées par les arguments commerciaux », estime l’éclairagiste conseil, d’autant plus que l’absence de normalisation n’aide en rien et qu’existent actuellement sur le marché deux systèmes différents, chacun s’implantant chez des fabricants différents (certains les proposent au choix) trop souvent incompatibles entre eux (Casambi et Xicato), comme ce fut déjà le cas au niveau du Wifi (Philips et Osram). « Non moins important en est le logiciel de programmation. On nous en vante la simplicité grâce à l’usage du smartphone ! C’est peut-être démonstratif mais vite inutilisable, notre “couteau suisse” ayant ses limites », constate Jean-Jacques Ezra- ti pour qui un smartphone est avant tout un téléphone et une boîte postale numérique.

QUE CHOISIR AUJOURD’HUI ?

« Tout dépendra du projet, toutes les options restantes ouvertes », répond l’éclairagiste-conseil. Concernant une nouvelle installation, et dans l’état actuel des technologies, il reste fidèle à la solution filaire du DALI2, l’investissement restant limité au passage de deux fils supplémentaires3 et les luminaires étant de plus en plus équipés, en standard, de drivers DALI. De plus, le protocole DALI-2 permet l’interopérabilité non seulement des drivers entre eux, mais aussi celle des capteurs et des relais, quel que soit le fabricant.

Dans le cas d’une installation existante nécessitant de contrôler un ou plusieurs luminaires, « le sans-fil est la solution la mieux appropriée ». Mais laquelle choisir s’interroge Jean-Jacques Ezrati ? Le choix est le plus souvent dicté par le fabricant du matériel d’éclairage qui inclut le système de gestion à son appareillage. Il conviendra alors de bien définir son projet (le type et le nombre de projecteurs, les scénarii envisagés, les capteurs ou relais à intégrer) ; les protocoles n’offrant pas tous les mêmes possibilités, ni les mêmes moyens de programmation (tablettes/smartphone ou ordinateur).

La question reste toutefois ouverte. Comme expliqué ci-dessus, le choix d’un protocole de gestion technique dépend, à la fois, de la structure du projet et de la prise en main du logiciel (tant en Bluetooth qu’en DALI) « tout en considérant, conclut Jean-Jacques Ezrati, que l’utilisateur final, non spécialisé, n’utilisera le système qu’une ou deux fois par an ». À noter que les services SAV des fabricants sont souvent disponibles à aider l’utilisateur, ce qui est le plus souvent possible de réaliser à distance.

1 Le DMX, même dans ses développements les plus récents, ne me semble pas adapter à l’éclairage muséographique qui demande souvent l’usage de nombreux scénarii conditionnés à l’usage de capteurs. De plus il n’est pas toujours proposé par les fabricants du domaine.

2 Aujourd’hui des passerelles permettent des liaisons sans fil dans une installation DALI (comme pour le DMX) voir sous ces deux standards des versions sans fil à l’étude.

3 L’alimentation des équipements est effectuée par un câble 5 conducteurs au lieu de 3.


Musée Soulages, Rodez.

L’exposition permanente des œuvres de l’artiste aveyronnais, père de l’Outrenoir, un « noir- lumière » a pour écrin un édifice conçu spécifiquement par les architectes de l’agence catalane RCR. Pour maintenir les niveaux idéaux dans la salle lorsque le soleil disparaît un système de régulation DALI par détecteur permet l’interaction entre la lumière naturelle et artificielle.

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