Rêves chromatiques ligériens

Mapping, mise en lumière, installations, creative coding… sont les nouveaux résidents du château de Beaugency dans le Loiret. Exit le mobilier Renaissance, les armures et autres trophées, place à la création contemporaine dans ce lieu à la riche histoire. Jérémie Bellot, accompagné d’Anne-Sophie Acomat, en ravivent l’architecture par les lumières d’un Centre d’art numérique qui le fait entrer dans le XXIe siècle.

© Château de Beaugency
© Château de Beaugency

Ci-contre.

Red Stars par Jérémie Bellot, Julien Desbrosses et Ena Eno.

« Alignement de planètes étoiles avec leur noyau, accompagnées par des constellations d’étoiles. Les lumières leur permettent de créer un passage vers le “multivers”, un univers parallèle matérialisé par les miroirs au sol. Une forme de rêve au milieu du cosmos », décrit Jérémie Bellot.

Avec ses mille ans d’histoire, le château Dunois de Beaugency, classé monument historique depuis 1926, n’est plus à un changement de vie près. Forteresse lors de son édification au XIe siècle, théâtre des guerres franco-anglaises pendant la guerre de Cent Ans et libéré de l’occupation britannique par Jeanne d’Arc en 1429, dépôt de mendicité au XIXe, son destin de bien public prend fin en 2012 lorsque le Conseil général du Loiret le fait basculer dans le domaine privé. Partiellement en tout cas, puisque son donjon qui s’élève sur plus de 30 mètres, l’un des plus beaux exemples de l’architecture militaire médiévale, reste propriété de l’État. Mais dans le contexte patrimonial riche et abondant de la vallée de la Loire, qui compte à elle seule quelque 3 000 châteaux, et faute de projet signifiant, le château n’a alors pas su attirer les visiteurs.

UNE COLLECTION ÉVOLUTIVE

C’est du côté du logis, qui s’organise autour d’une cour intérieure pavée, que le renouveau a pris place. 2020, Jérémie Bellot achète le château avec son épouse Anne-Sophie Acomat avec dans l’idée de créer un centre d’art numérique. Tous deux sont architectes et passionnés de vieilles pierres. Lui est passé par le cinéma où il s’est sensibilisé à l’image pour ensuite se diriger vers la création plastique numérique. On l’a remarqué lors de la dernière édition de la Fête des lumières de Lyon avec Iris, mise en lumière la façade emblématique de la cathédrale Saint Jean. En tant que directeur artistique de cet espace d’exposition de 1 500 mètres carrés, il donne ici corps à ses « rêves chromatiques ». S’il signe la plupart des œuvres, qu’il co-crée avec son collectif AV-Exciters, nous ne voyageons pas dans l’uni- vers d’un seul homme. Pour ce parcours immersif qui ambitionne de mettre en valeur l’architecture autant que les œuvres, il ouvre ses portes à d’autres artistes. Certaines installations ont déjà bien trouvé leur place, d’autres se percutent phoniquement parce qu’elles sont trop proches ou l’architecture disparaît dans l’obscurité. L’heure est encore aux derniers réglages et ajustements mais l’atmosphère recherchée est perceptible.

Depuis l’ouverture, la collection continue d’évoluer, avec une place réservée aux expositions temporaires. Pour l’heure, les visiteurs sont notamment plongés dans l’œuvre de Van Gogh. Mention spéciale pour l’installation Un rêve de bouleaux qui met en scène des troncs dont l’écorce se marie avec la matérialité des murs. La résonance est forte, augmentée par la lumière stroboscopique déréalisante. Tous les samedis soir d’été, la cour intérieure se pare de lumière.

Lucie Cluzan

Centre d’art numérique

2, place Dunois. Beaugency (45) www.chateau-beaugency.com

© Château de Beaugency, Jérémie Bellot / Photo Lucie Cluzan

Ci-dessus.

Un rêve de bouleaux blancs par Jérémie Bellot.

Œuvre in situ des plus réussies, elle interroge la manière dont on peut matérialiser ses rêves. Lumières épileptiques ou pulsations frénétiques, persistance rétinienne et cadrage d’un rêve de bouleaux blancs au sein de la tour hexagonale du jardin suspendu.

© Château de Beaugency
© Château de Beaugency
© Château de Beaugency, Jérémie Bellot / Photo Lucie Cluzan
© Château de Beaugency, Jérémie Bellot / Photo Lucie Cluzan

Lune Dichroïque, Jérémie Bellot

Dans la chapelle, un satellite en orbite est venu se positionner par magnétisme dans cette architecture dédiée au sacré. Il reflète et colorise son environnement, jouant de la lumière tel un vitrail.


Ci-dessous.

Dans la grande salle du rez-de-jardin, place aux installations temporaires avec pour cette saison une immersion dans l’œuvre de Van Gogh.

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