Plaidoyer pour une mutualisation intercommunale

Depuis quelques années, de nombreuses collectivités se sont lancées dans la rénovation énergétique de leur éclairage public sans toujours s’inscrire dans des perspectives organisées et cohérentes. Ainsi, en intervenant de manière isolée, elles optimisent certes la gestion technique du réseau sans pour autant profiter d’économies d’échelle. Yves Raguin, chef du département Infrastructures en réseaux, au sein de la FNCCR (Fédération nationale des collectivités concédantes et régies) décrit les bienfaits de la mutualisation.

Première brique de l’efficacité énergétique, la technologie LED annonce un changement de paradigme en matière d’éclairage public, de développement durable, de smart city et smart territoires. « Cette technologie associée à l’avènement du numérique permet de réaliser de substantielles économies d’énergie et de piloter à distance les installations, confirme Yves Raguin, pour qui l’éclairage devient ainsi un élément-clé qui ne servira bientôt plus uniquement à illuminer les rues. » Désormais, dans plusieurs villes, les installations d’éclairage public sont utilisées pour gérer des appli- cations urbaines telles que l’éclairage par détection de présence, la mesure en temps réel des données météorologiques ou du niveau de remplissage des conteneurs à déchets, la gestion des flux de circulation des véhicules et des piétons, la gestion du stationnement, la sonorisation des espaces, la mesure des niveaux de particules fines, d’ozone, de pollution sonore et encore bien d’autres services comme l’arrosage automatique des espaces verts ou l’alimentation des bornes de re- charge pour véhicules électriques. En plus d’apporter de nouveaux services et d’améliorer le cadre de vie des citoyens, ces applications permettent de rendre les villes moins énergivores et plus vertes. « Nous l’aurons compris, cette approche multiservices de la télégestion de l’éclairage permet bien évidemment de mutualiser aussi les coûts », considère Yves Raguin.

DÉVELOPPER UNE VISION POLITIQUE

Aujourd’hui, les entreprises affichent leur volonté de se positionner comme de véritables acteurs dans la transition numérique et énergétique. Leurs actions permettent de mettre en valeur des infrastructures via les objets connectés, de générer des économies d’énergie tout en contribuant à la valorisation du patrimoine et faire du candélabre un support d’objets connectés pour apporter plus de services aux citoyens. « Incontestablement, les enjeux de l’éclairage public sont donc corrélés à ceux de la smart city », poursuit Yves Raguin en estimant que les technologies peuvent apporter de la valeur aux territoires et aux villes. « Toutefois, cela suppose avant tout de développer une vision politique ain- si que des solutions propres à mutualiser les équipements afin de cumuler plusieurs objectifs. »

L’ÉCLAIRAGE PUBLIC, UN OUTIL DE LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE

Aujourd’hui, on estime à environ 10 millions le nombre de points lumineux installés en France, pour une puissance appelée de 1 260 MW, soit environ une tranche nucléaire. Chaque année, cet éclairage public consomme 4,7 TWh et représente 48 % de la consommation d’électricité des collectivités et 37 % de leur facture d’électricité. Environ 75 % des luminaires installés sont âgés de plus de 25 ans, le taux de renouvellement s’élevant entre 3 et 4 % par an. Aussi, faudrait-il environ 30 ans pour entièrement renouveler ce parc vieillissant. Pour les collectivités, l’éclairage public, dont le potentiel d’économie d’énergie se situe entre 50 et 80 %, demeure un des enjeux de la transition énergétique, les syndicats d’énergie et les métropoles en gérant environ la moitié du parc. Enfin, soulignons que, dans notre pays, les dépenses annuelles consacrées à l’éclairage public s’élèvent à près de 2 milliards d’euros, dont 1 milliard à la maintenance, 450 millions au renouvellement du parc et 550 millions à la consommation d’énergie.

« La problématique des cités intelligentes, grandes, moyennes et petites, ainsi que des territoires connectés n’est plus liée à la technologie mais aux contraintes budgétaires, pouvant être dépassées par une vision politique consistant à intégrer plusieurs projets, structurants pour les territoires, adaptés à leur diversité », poursuit-il. En effet, l’une des préoccupations des collectivités est la gestion des données (mobilité, transports, eau, énergie, chauffage urbain) qu’il faut maîtriser au moyen de services internes et/ou externalisés.

Les collectivités ont besoin de ces données pour créer de la valeur ajoutée, en les croisant, tandis que les syndicats de grande taille et les métropoles ont tout intérêt à maîtriser les outils de communications électroniques sur leurs territoires et les systèmes d’information nécessaires à la continuité du service public. De plus en plus de services passeront par les objets connectés, ce qui devrait permettre d’améliorer l’équation économique par un retour sur investissement.

« Les territoires savent s’adapter et innover, à condition de disposer d’une vision d’ensemble », considère le chef de département de la FNCCR, cette dernière préconisant, dans cette perspective, de réaliser un schéma directeur d’aménagement lumière (SDAL), voire d’aménagement d’objets connectés. C’est la raison pour laquelle la Fédé- ration invite les communes à transférer la compétence Éclairage public aux EPCI (Établissement public de coopération intercommunale) ou aux syndicats mixtes afin de mutualiser les coûts d’investissement et les travaux, de bénéficier d’aides financières, et, également, de partager une vision commune de l’éclairage public sur l’ensemble du territoire géré par le syndicat.

LA COMMUNE CONSERVE SES PRÉROGATIVES

« L’éclairage public représente l’exemple parfait d’une compétence où la mutualisation intercommunale pertinente est conciliable avec les exigences d’un service public de qua- lité au plus près des administrés », estime Yves Raguin, en rappelant qu’en cas de transfert de la compétence Éclairage public aux syndicats, « le maire continue d’exercer son pouvoir de police (arrêtés fixant les lieux et horaires d’éclairement) et la commune conserve ses prérogatives ». Et de conclure que, face aux différents enjeux (sécuritaires, économiques, environnementaux…) représentés par l’éclairage public, véritable outil de la transition énergétique, « les syndicats intercommunaux mixtes d’énergie ou les métropoles sont mobilisés et structurés pour réussir cette transition ».

À suivre sur www.lux-revue-eclairage.fr

En éclairage public, le CGEDD préconise :

  • le renforcement des partenariats avec les syndicats d’énergie ;
  • la création d’un conseil national « lumière ».

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