Depuis 2009, Jean Bidégaray, chef de service « Lumières de ville » au sein du département qualité urbaine et de la direction « Mobilité et Espaces Publics », prolonge la démarche d’amélioration de la vie à Pau, même nocturne, lancée il y a 25 ans et l’accélère depuis l’élection, le 4 avril 2014, de François Bayrou à la mairie.
Il y a déjà 25 ans, en 1996, André Labarrère, alors député maire de Pau, s’est attaché à développer « la qualité de vie urbaine, la richesse du patrimoine architectural et historique, ainsi que l’ampleur et la qualité de ses espaces ». Dans ce cadre, il a engagé une réflexion pour que cette qualité s’affiche en toute saison, la nuit tombée, en faisant appel à la lumière. C’est ainsi que, en liaison avec les Services techniques de la ville, a été constituée une équipe pluridisciplinaire au sein de laquelle était associé le concepteur lumière palois Roland Estellat (président du centre régional AFE « Pays de l’Adour » et trésorier au sein du bureau de l’AFE), pour « élaborer une démarche globale d’urbanisme lumière ».
Dès sa nomination à la tête du service Éclairage public (son ancien nom), sous la mandature de Martine Lignières-Cassou, députée maire de 2008 à 2014, Jean Bidégaray s’est vu confier, un projet majeur de mise en lumière. « L’exécutif a alors décidé de rendre un hommage royal à Henri IV à l’occasion du quadri centenaire de sa mort » et de la tenue dans le musée national du château d’une exposition exceptionnelle « Paris vaut bien une messe » 1610 : Hommage des Médicis à Henri IV, Roi de France et de Navarre rappelle-t-il. Comment ? En magnifiant par la lumière le château de Pau nouvellement restauré.
CONSTRUIRE UNE IDENTITÉ NOCTURNE
Ainsi, sous l’égide du Directeur général des services de l’époque, Jean-Pierre Cremer, et de la direction des affaires culturelle, alors dirigée par Frantz Delplanque, le château s’est illuminé, le 14 mai 2010, grâce à une création originale de sublimation pérenne du monument et d’un parcours spectacle, baptisé « La Lune avec les dents », mêlant vidéo monumentales et projecteurs à découpe créé par Skertzo (Jean-Michel Quesne et Hélène Richard) et LEA – Les Éclairagistes Associés (Laurent Fachard), un son et lumière poétique dans le domaine et la cour d’honneur du château.
Avec plus de 40 000 spectateurs sur les 20 dates en 2010, l’obtention du 2e prix des 8e City. People. Light Awards (concours de villes internationales porté par Philips et l’association LUCI) et, à la faveur de la labellisation, de la ville de Pau « Ville d’Art et d’Histoire » signée en mars 2012 auprès du Ministère de la Culture et de la Communication, aurait dû commencer une démarche, fondée sur le regard croisé de concepteurs lumière, d’élus, de dirigeants municipaux et professionnels du tourisme. Démarche visant à « positionner la lumière dans la construction d’une identité nocturne singulière, particulièrement attractive. Ce label est en effet attribué aux territoires, communes ou regroupements de communes qui, conscients des enjeux que représente l’appropriation de leur architecture et de leur patrimoine par les habitants, s’engagent dans une démarche active de connaissance, de conservation, de médiation et de soutien à la création, à la qualité architecturale et au cadre de vie ». Mais, après la 3e saison du parcours spectacle la ville renonçait en fin d’année à le reconduire et à ce niveau d’ambition en raison de difficulté d’exploitations, de gouvernance et de priorisations budgétaires.
Ci-contre et ci-dessous. Le nouvel éclairage du quartier du Château refaçonne l’image nocturne de la ville et contribue à son attractivité. À l’installation, les luminaires sont réglés en 3 000 K mais peuvent être descendus en 2 200 K pour certains points spécifiques. Il existait dans la première version de Stylage un effet flammé et des vitres abandonnés pour répondre à l’arrêté des nuisances lumineuses.
CENTRE-VILLE : COMPTER SUR LES LANTERNES Pas aussi vieux que le château mais avec deux cycles de vie, soit 40 ans, les lanternes du quartier du Château et du 14 Juillet, et plus généralement du centre-ville, avaient le plus grand besoin d’être remplacées. Dans l’urgence mais pas dans la précipitation, « c’est un projet sur plusieurs années mais qui pour 2021 est prioritaire dans le plan d’action centre-ville », précise Jean Bidégaray. Côté choix du modèle de lanternes, « après consultation en 2015, marché public étant, celui qui a remporté la course a été le Stylage de chez Comatelec Schréder car il répondait d’une part à l’esthétique recherchée, mais aussi aux exigences concernant les capacités photométriques et le ratio consommation/efficacité énergétique », se souvient-il. Si les luminaires installés en façade sur console Romance sont simplement remplacés, dès qu’il s’agit de zones de rencontre, le bureau d’études interne à la ville, en la personne de Thibaud Cambon, est sollicité pour travailler de front avec Gregory Mendiboure, responsable d’exploitation et de maintenance du réseau de la Ville, pour définir la meilleure conception possible. Dans tous les cas, ils répondent aux exigences de l’arrêté sur les nuisances lumineuses. L’objectif est le remplacement des 2 300 luminaires d’ici 2023. Tout dépend bien entendu du budget annuel alloué même si la Ville fait un effort indéniable pour cette rénovation essentielle à bien des égards. Les 800 000 euros investis sont entièrement consacrés à la fourniture. Pas de coût d’installation à ajouter puisque les savoir-faire sont ceux de la régie. LC |
SÉCURITÉ ÉLECTRIQUE ET EFFICIENCE ÉNERGÉTIQUE D’ABORD
Dans le même temps, Jean Bidégaray proposait alors avec son équipe de conduire une profonde réorientation du management de la maintenance en régie afin de lancer un programme de rénovation de l’ensemble du parc d’éclairage public. À la suite de plusieurs diagnostics patrimoniaux, le projet est validé par l’exécutif. Le plan d’action de sécurité électrique et d’efficience énergétique, conduit en régie, sera ainsi lancé dès en 2013. Toutefois, après les deux premières années de traitement, « ce plan d’action, commencé en sources à décharge, donnait ses premiers résultats d’économie d’énergie mais s’est heurté à la question sensible d’ambiance lumineuse urbaine, d’un point de vue perception spatiale de l’environnement nocturne, particulièrement en centre-ville », poursuit-il. Aussi, le 12 janvier 2015, dans le cadre du programme politique « Aimons Pau » développé par François Bayrou, a été proposé « un outil de planification stratégique consistant à éclairer juste et rayonner », rappelle-t-il avec pour objectif de « mettre en œuvre une nouvelle lumière urbaine ne se contentant plus des seuls besoins fonctionnels et sécuritaires », explique- t-il. Le Maire décidait également de relancer la mise en lumière du château et validait la requalification sur le site classé de la ville de la lumière fonctionnelle du boulevard des Pyrénées avec la rigueur historique de l’éclairage de style du XIXe siècle. La fonderie d’art Fontes de Paris était ainsi retenue pour redonner son air Belle Époque au boulevard quand après l’huile, le gaz éclairait la ville.
PLANIFICATION LUMINEUSE
« Pour créer et façonner l’image nocturne d’une ville et améliorer le cadre de vie de ses habitants, il ne suffit pas de recenser les monuments à sublimer.
Il faut composer, rythmer et différencier par l’ombre et la lumière qui la composent. » Cette définition du concepteur lumière Roger Narboni, Jean Bidégaray en a fait sienne. À partir de ce concept, a été acté le principe d’une gestion différenciée centre-ville et hors centre-ville. L’objectif ? « Créer une identité nocturne valorisante, respectueuse de la grandeur de l’histoire de la ville, particulièrement en centre-ville », explique-t-il… sans pour autant minorer les singularités propres à l’identité des autres quartiers de la ville et à l’équilibre des prescriptions. Dans ce contexte, ont été définies trois études stratégiques de planification lumière : une charte et un plan lumière « centre-ville » confiés à deux conceptrices lumière, Virginie Voué (Luminescence) et Sara Castagné ; un SDAL (schéma d’aménagement lumière) pour le projet de rénovation urbaine du quartier prioritaire de Saragosse, également confié aux deux conceptrices et une charte d’éclairage fonctionnel pour le reste de la ville confiée à Virginie Voué.
LUMIÈRES DE VILLE
Depuis 2016, à partir de ces études et conjointement à l’introduction de la technologie LED jugée désormais mature par Jean Bidégaray, le plan d’action ne cesse de se bonifier en associant « sécurisation, efficience énergétique, innovation, rayonnement et attractivité ». Le service éclairage public est, quant à lui, renommé « Lumières de ville », les opérations continuant à être conduites en régie.
« À présent, la troisième phase du plan d’action s’accélère, stimulée par un niveau d’investissement croissant et la spécialisation de cadre et d’agents de maintenance dédié à cette mission parallèlement à des projets d’aménagements particulièrement structurants qui refaçonnent l’éclairage public de la ville », conclut Jean Bidégaray en citant, notamment, le projet d’éclairage, conçu par Virginie Voué, du bus à haut niveau de service (BHNS) ou encore le projet du Hédas de Lionel Bessières également primé.
JD