Le premier Plan Lumière de 1989, initiative jusqu’alors inédite en France, a permis l’illumination pérenne plus de 350 sites. Il s’agissait alors de repenser l’éclairage urbain pour l’envisager au-delà de son aspect sécuritaire. Le second Plan, lancé en 2005, s’est quant à lui attaché à penser la ville et la lumière autrement. Il s’affranchit des monuments pour s’attacher au lien entre lumière et territoires et s’adapter aux usages et aux habitants. Le développement durable intègre alors cette démarche permettant d’ajouter près de 1 000 points lumineux chaque année… tout en baissant de 35 % la consommation d’énergie. Par ailleurs, des plans territoriaux sont conçus en créant des ambiances adaptées à l’identité de ces quartiers… en misant sur un pilotage intelligent de l’éclairage, notamment par la détection de présence.
Les Lyonnais ont fait leurs les mises en lumière de la dernière décennie qui, à présent, forment un paysage familier et apprécié. Grâce à elles, la ville vit la nuit, elle se contemple et elle se visite », se félicitait, en 2005, Gilles Buna, alors adjoint au maire, chargé de l’Urbanisme et du développement durable auquel Gérard Collomb, maire de Lyon, avait confié l’élaboration du nouveau Plan Lumière.
Riche des 15 premières années d’expérience, la nouvelle équipe en a tiré un enseignement majeur. Lorsque l’on parle de lumières urbaines, il est aberrant de ne s’exprimer qu’en termes de lux ou lumen. Avant tout, il convient de considérer l’aspect nocturne du paysage. C’est cela qui, sur le plan purement psychologique, fait que le public apprécie ou non la qualité, l’intensité ou l’impression de sécurité résultant de tel ou tel éclairage urbain.
Aussi, en 2005, quand la ville de Lyon a renouvelé son Plan Lumière, il a été tenu compte de cet enseignement. Plusieurs nouvelles ambitions ont été visées, tout en ouvrant encore le champ de la création : intégrer les nouvelles possibilités techniques, mieux utiliser la lumière dans un souci de développement urbain ou social, prévenir les risques de « cacolumie » (cacophonie lumineuse), réduire les consommations énergétiques et les pollutions nocturnes.
NOUVELLES PRIORITÉS
Au niveau de la direction de l’éclairage public où, en 2012, Thierry Marsick a succédé à Antoine Bouchet, tandis que Jacques Fournier a pris en charge la responsabilité du bureau d’études, cette nouvelle orientation s’est traduite par trois priorités :
- éclairer sans compter n’est plus acceptable ;
- inventer une écriture contemporaine en renforçant la création ;
- adapter l’éclairage aux mouvements temporels de la ville car, « pendant 90 % du temps, on éclaire pratiquement pour rien sur certains territoires ».
La technologie LED associée au pilotage des systèmes de commande permet du tendre vers ces objectifs. À présent, l’éclairage, moins consommateur d’énergies, devient plus respectueux de l’environnement et de la biodiversité. « Mais nous atteignons une limite physique au niveau des luminaires aujourd’hui à notre disposition », soulignait Thierry Marsick dans l’édition 288 du LUX (septembre-octobre 2016). À savoir la diffusion des 80 à 90 lm/W, efficacité lumineuse exigée dans la cité des Gaules pour respecter la notion de confort visuel.
« Au-delà, ça serait aberrant économiquement parlant », estime-t-il.
RETOUR RUE DE LA RÉPUBLIQUE
La célèbre rue piétonne de la République, une des trois plus belles de Lyon, est l’artère principale de la presqu’île (1,5 km), la principale rue commerçante de la ville… et l’une des principales d’Europe. Majoritairement bordée d’immeubles construits au XIXe siècle, le groupe Grosvenor Fund Management gère depuis 2012, pour le compte d’Abu Dhabi Investment, la moitié de la « rue de la Ré », comme la surnomment les Lyonnais. Disposant d’un logo et de sa marque (un lion bleu intitulé « Rue de la République ») inaugurés en 2015, c’était la première fois, en France, qu’une rue historique, classée au patrimoine mondial de l’Unesco, appliquait une stratégie de développement comme le font les centres commerciaux.
Aussi, lui fallait il une lumière adaptée aux mass-market de cette rue piétonne. « Depuis 2016, 25 façades privées haussmanniennes sont valorisées par une nouvelle mise en lumière nocturne respectant le caractère historique et patrimonial du lieu », décrit Guillaume Jéol (Atelier Jéol). Et d’expliquer qu’une lumière semi-rasante, intégrée aux façades, exprime, avec une certaine douceur, le volume général du bâti tout en renforçant la présence des ornementations par l’accentuation de leur relief grâce à des ombres légèrement portées.
De plus, une lumière plus ponctuelle, également intégrée à la nouvelle signalétique des immeubles, anime spécifiquement les entrées remarquables. Enfin, la mise en valeur de ces façades patrimoniales prend en compte le modelage des volumes et des reliefs par un jeu de teintes nuancées blanches qui ne dénature pas les teintes initiales des matériaux. « La lumière émise est confortable pour les riverains, l’utilisation d’optiques précises limitant considérablement les pertes vers le ciel », poursuit Guillaume Jéol, qui a utilisé un total de 668 projecteurs1 représentant une puissance installée de 880 W par façade et une puissance totale consommée de 22 kVA (contre 42 kVA auparavant). La facture d’électricité s’élève à 4 500 €/an, pour 1 700 heures de fonctionnement (de la tombée de la nuit à minuit).
Depuis octobre 2016, la rue de la République, les volumes généreux et la richesse de détails de l’architecture, sont révélés par une lumière semi-rasante totalement intégrée aux façades.
L’Atelier Roland Jéol a fait installer 674 projecteurs pour une puissance totale consommée de 22 kVA. L’économie réalisée par rapport à l’ancienne installation est de 86%.
Inauguré en 1894, l’hôtel Carlton est le « petit palace » lyonnais. Il se distingue par ses balcons en fer forgé et à sa fine décoration. L’Atelier Roland Jéol a opté pour un éclairage homogène, tout en faisant ressortir le relief par des ombres portées. Le blanc de la pierre est ravivé par des projecteurs LED 3 000 K fixés sur les balcons.
Bon nombre de professionnels du design et de l’architecture, de l’aménagement urbain et du paysage, ont contribué à faire de Lyon la ville des Lumières.
Bon nombre de professionnels du design et de l’architecture, de l’aménagement urbain et du paysage, ont contribué à faire de Lyon la ville des Lumières.
Bon nombre de professionnels du design et de l’architecture, de l’aménagement urbain et du paysage, ont contribué à faire de Lyon la ville des Lumières.
Bon nombre de professionnels du design et de l’architecture, de l’aménagement urbain et du paysage, ont contribué à faire de Lyon la ville des Lumières.
Bon nombre de professionnels du design et de l’architecture, de l’aménagement urbain et du paysage, ont contribué à faire de Lyon la ville des Lumières.
Bon nombre de professionnels du design et de l’architecture, de l’aménagement urbain et du paysage, ont contribué à faire de Lyon la ville des Lumières.
PART-DIEU : SKYLINE ET EXPÉRIMENTATIONS MOBILIÈRES
Faisant suite au premier projet conçu, en 2000, par LEA (Les Éclairagistes Associés), le plan lumière « Part- Dieu », est mis en œuvre, depuis 2015, par Vincent Thiesson (Agence ON) qui s’applique à « associer l’ensemble des acteurs privés du projet urbain (promoteurs, architectes, concepteurs lumière) et le service éclairage public de la ville de Lyon pour la mise en place progressive d’un paysage nocturne global intégrant les lumières des espaces publics, des pieds de bâtiments et des façades », explique le concepteur parisien. Des fondamentaux simples ont été partagés : lumières blanches (de l’or à l’argent) ; temporalités adaptées (pas de lumière
« L’ensemble doit finalement définir une skyline, cohérente et apaisée, résolument présente dans le paysage lyonnais », explique Vincent Thiesson en précisant que de premières réalisations sont d’ores et déjà visibles (le Silo à Livres, tour Incity, immeuble Silex 1, Terralta, Sky56).
Parallèlement, les travaux de réaménagement des espaces publics suivent l’édification des différents immeubles et tours du projet urbain. Par exemple, la place de Francfort, livrée fin 2018 accompagnée de son nouvel éclairage public, propose maintenant un éclairage doux et généreux accompagnant les nombreux flux des piétons entre la gare de Part-Dieu et la gare routière. Elle accompagne les espaces d’attente dans une lumière plus contrastée tandis que sont projetés des éclairages verticaux graphiques ou diffusant sur les nombreux arbres plantés sur la place. Enfin, au centre de la place, l’abri- bus pour les voyageurs marque un point de focalisation avec sa lumière intégrée.
Les premiers mobiliers spécifiquement développés pour le quartier sont par ailleurs apparus en proposant des expérimentations : mise en place d’accessoires en pied de mât pour accompagner les usages (tablettes, miroirs, portemanteaux, reposes fesses). Leur design épuré (mât carré) permet de plugger les équipements nécessaires à l’espace public : appareils d’éclairage évidemment, mais également caméras, antennes wifi, horloge etc. Leur finition est volontairement brute laissant apparaître l’acier galvanisé de la matière. Le mobilier est clair et s’intègre dans le paysage de la place. L’implantation semble aléatoire et respecte la trame des arbres de tout le futur quartier.
« Tous les appareils sont connectés au système de télégestion de la ville, une programmation étant en cours pour ajuster au mieux les niveaux d’éclairement en fonction des horaires », ajoute Vincent Thiesson pour qui la prochaine étape, non des moindres, est la métamorphose du boulevard Vivier-Merle dont les travaux vont démarrer cet été entre la gare Part-Dieu2 et la rue Lafayette. Enfin, une dernière composante du Plan Lumière est en cours de finalisation portant sur les éclairages spécifiques des passages sous les voies SNCF.
ACTE 3 : ET MAINTENANT ?
Le 16 mai 2019 représente une nouvelle date importante pour Lyon, la ville des lumières. Pour deux raisons :
- d’une part, le matin, le groupe immobilier Cardinal et le Cluster Lumière ont choisi la Journée Internationale de la Lumière pour la pose de la première pierre de Lumen La Cité de la Lumière. « Plus qu’un bâtiment, c’est un projet unique en Europe qui va s’ériger au cœur de la Confluence, quartier innovant de Lyon, en 2021 », commente Philippe Badaroux, président du Cluster Lumière. Et de souhaiter que ce bâtiment de 6 000 m2 réunisse l’ensemble des acteurs de la filière lumière et devienne « un espace où vivre et travailler ensemble » ;
- d’autre part, le soir, a été inaugurée par Gérard Collomb la mise en lumière pérenne de la façade du Grand Hôtel Dieu, réalisée par Guillaume Jéol (Atelier Roland Jéol).
À partir de ces deux événements, se poursuit le développement lumière de Lyon, accompagné par la spectaculaire Fête des Lumières de décembre qui fait référence dans le monde. Quelles orientations sont à présent envisagées ?
Ce troisième acte fera l’objet d’une prochaine parution dans LUX avec les principaux acteurs concernés… D’ores et déjà, avançons une première approche que l’on doit à Thierry Marsick : « L’éclairage urbain représente un bon dialogue entre éclairage public et éclairage privé. Le jour où l’on arrivera à faire communiquer ces lumières ensemble, on entrera réellement dans le concept de ville intelligente. » Gageons également que l’aspect sécuritaire sera également encore plus pris en considération par Jean-Yves Sécheresse qui, en tant que 5e adjoint a en charge la sécurité et la tranquillité publique, ainsi que l’éclairage public. Le dramatique épisode du 24 mai dernier, rue Victor Hugo, pèsera sans doute dans les nouvelles orientations. À suivre donc…
1 Projecteurs LED Meyer (Micro 13 W, Nano 6 W et Ecopost 1,9 W) et LEC (4660-Corsica).
2 Rappelons que Laurent Fachard (LEA) travaille, quant à lui, à concevoir la charte lumineuse de la gare Part-Dieu dont l’achèvement de la profonde rénovation est prévu en 2023.
La rénovation de la mise en lumière de la bibliothèque municipale, signée Guillaume Jéol, est la première intervention dans le cadre du plan lumière Part Dieu, avec le concept de « lumière silhouette ». À doite, la place de Francfort, lieu de passage entre les gares ferroviaire et routière, profite d’un éclairage doux et généreux conçu par l’agence ON.
Le 16 mai dernier a été posée la première pierre de Lumen, cité de la Lumière initiée par le Cluster lumière. L’architecture est signée Agence a+ samuel delmas et la mise en lumière Wonderfulight, Anne Bureau.