Pau : 12 années de transition éclairagiste… aussi en intérieur

Dès 2008, sous l’impulsion d’une volonté politique forte, la ville de Pau a lancé une phase de rénovation des locaux d’enseignement placée sous la responsabilité de Guilhem Massip, alors chargé d’exploitation électrique. Depuis, dans la plupart des bâtiments gérés par la ville, ont été multipliées les initiatives démontrant que les éclairages intérieurs constituent (aussi) un levier d’économies substantielles.


QUEL RÔLE JOUERA LE DIGITAL ?

La digitalisation des bâtiments permet de collecter davantage de données utilisateurs, et de traiter plus efficacement les thématiques de confort.

Aujourd’hui, on voit apparaître des bâtiments intelligents dotés de capteurs et de systèmes permettant de mesurer certains paramètres (ex : conditions climatiques, niveaux de lumière etc.) et de contrôler certains équipements (teinte de vitrage, position de stores, activation de l’éclairage etc.) pour améliorer les conditions de confort visuel d’un espace.

Demain, cette gestion pourrait être encore plus perfectionnée, en installant plus de capteurs dans le bâtiment et en travaillant sur des approches basées sur l’intelligence artificielle. Ainsi, on pourrait apprendre des préférences et des comportements des utilisateurs, pondérer un utilisateur plus qu’un autre parce qu’il est situé dans un fond de pièce… et développer des modèles plus intelligents pour répondre précisément aux besoins des occupants.

Ensuite, le digital combiné à la miniaturisation des capteurs devait permettre de développer tout ce qui est lié aux effets non- visuels de la lumière. Par exemple, on pourrait imaginer concevoir un bâtiment dans lequel seraient mises à disposition des utilisateurs des lunettes permettant de mesurer la synchronisation du cycle de sommeil. Dès que ce dernier ne serait plus synchronisé, l’information serait envoyée au bâtiment afin d’analyser les solutions possibles pour le synchroniser de nouveau, et ainsi garantir le bien-être et la santé des personnes.

Voir le site www.sageglass.com/ fr/visionary-insights, plateforme proposant des informations autour de la lumière naturelle, de la vue et du confort dans les bâtiments.

Ameller Dubois & associés © Jean-François Tremege
Ameller Dubois & associés © Jean-François Tremege
Ameller Dubois & associés © Jean-François Tremege

Aujourd’hui, en tant que conseiller innovation et  transition  énergétique  de  la  Communauté d’agglomération Pau-Béarn-Pyrénées, Guilhem Massip témoigne que les municipalités peuvent aussi économiser au niveau de l’éclairage  intérieur  de  leurs  bâtiments  tout en contribuant à un meilleur confort visuel. À Pau, la première phase de rénovation des locaux d’enseignement a débuté, en 2008, avec des luminaires fluorescents T5 équipés de détecteur de présence et de lumière (voir LUX 259). Deux critères ont alors été particulièrement travaillés : l’efficacité énergétique et le confort visuel.

« Cette opération s’est traduite par des résultats très positifs en termes de rendu mais, également, au niveau de la formation des agents de la collectivité », souligne Guilhem Massip. De plus, elle a reçu la confiance des élus favorables à l’élargissement des domaines d’intervention, y compris en dehors du patrimoine tertiaire. Nous y reviendrons !

APPRENDRE DES LOCAUX D’ENSEIGNEMENT

Un module pédagogique avait été créé à destination des enseignants et des élèves afin de bien faire comprendre la démarche portant sur la rénovation des locaux d’enseignement. Les agents ont également été formés à l’installation de ces nouveaux types d’appareils. Cette première phase de rénovation a permis de largement diminuer les opérations de maintenance. « Sur les quelque 25 000 tubes fluorescents alors installés, aucun remplacement n’est à compter à ce jour», se félicite Guilhem Massip. Depuis 2015, 100 % des projets sont réalisés en technologie LED, tout en ayant maintenu la gestion locale par détection de présence et de lumière. En conséquence, de nouveaux gains en efficacité énergétique, la consommation énergétique ayant encore été divisée par deux par rapport à la technologie T5, et en confort visuel via des luminaires adaptés aux différents usages (éclairage direct/indirect, absence visuelle des sources et donc de risque d’éblouissement…).

« Le bilan économique s’avère très favorable tant au niveau exploitation que maintenance », souligne Guilhem Massip en annonçant un retour sur investissement compris entre 2 et 5 ans, selon la typologie tertiaire, avec un niveau de maintenance presque nul. « À l’époque, poursuit-il, nous comptions 4 électriciens et 2 véhicules, utilisés à temps plein, dédiés au changement de lampes. Aujourd’hui, n’ayant quasiment plus de relamping à effectuer, nous avons formé ces agents pour mener des projets plus valorisants tels que le remplacement des luminaires ou la prise en charge de chantiers globaux au lieu de les sous-traiter à des entreprises extérieures. »

À partir de cette première expérience concrète, ont été généralisées les mêmes prescriptions au niveau de toutes les réalisations paloises, y compris celles sous maîtrise d’œuvre externe ainsi que le stade et le Palais des sports.

« Nous avons d’ailleurs participé à l’écriture du cahier des charges de la Ligue Nationale de basket-ball et celle de rugby », précise Guilhem Massip, dont on connaît l’engagement vis-à-vis du basket1. À un tel niveau d’exigence, la notion de confort étant très présente, tous les dossiers ont été étudiés sous « DIALux Evo » et ont fait l’objet d’une attention particulière lors d’interventions dans des locaux où interviennent des travailleurs. « Par exemple, nous travaillons sur l’intégration de luminaires s’adaptant aux cycles circadiens. »

Nous avons étroitement travaillé avec la maîtrise d’œuvre et vite perçu les enjeux de l’éclairage sur ce lieu central et attrayant de la vie paloise.

AU CŒUR BATTANT DU CENTRE-VILLE

La rénovation du poumon économique, social et gastronomique que sont, pour la ville, les Halles de Pau, représente, depuis le 12 septembre 2018, une référence pour la municipalité, ce projet ayant été distingué, en 2016, au Wan Awards (World Architecture News Award) parmi 6 projets mondiaux. « De suite, nous avons étroitement travaillé avec la maîtrise d’œuvre de l’équipe des architectes Philippe Ameller et Jacques Dubois et vite perçu les enjeux de l’éclairage sur ce lieu central et attrayant de la vie paloise. » Plusieurs aspects ont été pris en compte : les anciennes halles et le parking souterrain, trop sombres, paraissaient peu sécuritaires ; les produits des étaliers et des producteurs n’étaient pas mis en valeur ; l’éclairage des bureaux de la tour était inconfortable ; ce bâtiment devait renforcer l’attractivité du centre-ville et être un signal pour l’agglomération paloise. « À tous ces aspects, nous avons répondu au plus haut niveau », explique Guilhem Massip. À savoir :

  • un   projet   100   %   LED   (durée   de   vie > 100 000 heures) pour l’éclairage général des deux niveaux des halles (3,50 m de hauteur pour le 1er niveau ; 7,50 m pour le second) et des deux étages de parking du fait de la complexité de la maintenance. Le niveau d’éclairement atteint les 300 lux dans les halles, (avec possibilité de monter jusqu’à 500 lux en fonction d’événements particuliers), avec une température de couleur de 3 000 K et une uniformité de 0,72. Une GTC (gestion technique centralisée) gère l’ensemble des éclairages (gradation, horaires d’utilisation…) et permet une grande flexibilité des locaux. Quant au niveau du carreau des producteurs, situé à l’entrée des halles, l’IRC est supérieur à 90 pour un R9 >50. Enfin, les 8 niveaux de bureaux, aménagés en septembre dernier, sont équipés d’éclairages connectés avec détecteur de présence et de lumière, adaptés aux usages exercés au sein de la tour (services municipaux, sièges d’associations, location de salles de réunion…) ;
  • mise en valeur du bâtiment, le cabinet d’architectes Ameller et Dubois s’étant attaché l’expertise du concepteur lumière François Migeon (8’18”) pour proposer un projet élégant et contemporain, valorisant la signature architecturale du bâtiment par des traits de lumière.
Ameller Dubois & associés © Jean-François Tremege
Ameller Dubois & associés © Jean-François Tremege

Sur les deux niveaux des halles, chacun des 42 commerçants résidants a pu personnaliser son étal après que son dossier ait été validé par le service technique de la ville. L’éclairage général est 100 % LED, avec une température de couleur de 3000 K et une uniformité de 0,7. Le bâtiment est entièrement géré par une GTC (gradation, horaires d’utilisation…).2


QUEL BILAN ?

Sur 12 ans, « le bilan économique est financièrement très favorable », se félicite Guilhem Massip. Même s’il est difficile de cumuler l’ensemble des coûts évités et le retour sur investissement global, « nous savons nos prescriptions très qualitatives de par les réponses aux besoins exprimés tout en se quantifiant techniquement et financièrement ».

Aussi, la démarche construite au fil de ces années, est aujourd’hui intégrée dans tout projet.

ET MAINTENANT, PLACE AU CINÉMA !

« Nous avons commencé la construction d’un bâtiment neuf qui comptera 3 salles de cinéma d’art et d’essais dont une d’entre elles pourra se transformer en salle de spectacle vivant », poursuit Guilhem Massip, en rappelant que les éclairages pour des cinémas et salles de spectacles sont très différents de ceux d’un bâtiment tertiaire. En effet, l’éclairage d’un cinéma se définit par le « noir salle » nécessitant un éclairage de signalisation pour les circulations et une mise en lumière de la salle sans perturbation sur l’écran et aucun éblouissement afin de revenir, progressivement, vers un niveau général de lumière à l’extérieur.

L’ensemble du projet  sera  évidemment 100 % LED avec un niveau de confort élevé (absence visuelle des sources, gradation…). La salle de spectacle, quant à elle, sera accompagnée de projecteurs de scène et d’un système de programmation  pour  disposer d’un éclairage scénique adapté à toutes sortes de spectacles.

1 Guilhem Massip est vice-président du Comité directeur de l’Élan Béarnais.

2 Les 42 commerçants résidents ont, quant à eux, personnalisé leurs étals afin de valoriser la présentation de leurs produits. Chaque dossier d’éclairage a été validé par le service technique de la ville.

Ameller Dubois & associés © JFrtanck Brouillet
Ameller Dubois & associés © JFrtanck Brouillet
Cœur battant du centre-ville, les nouvelles halles constituent un ensemble de commerces en étal et de bureaux. L’ensemble est signé par l’Agence Ameller Dubois & associés pour l’architecture et 8’18” pour la conception lumière.

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