L’esprit sagace de Philippe Badaroux, président du Cluster Lumière, n’est plus à démontrer. Aussi, suite à sa visite du secteur “éclairage” du SMCL (Salon des Maires et des Collectivités Locales), il est pertinent de publier les réflexions “d’usage” que la Lettre Lux lui a demandées.
Tout d’abord, beaucoup de visiteurs (1), particulièrement le mercredi, présents sur quasiment tous les stands du hall 3, secteur “Energie & Climat”, concernant, de près ou de loin, la lumière. Et toujours, une large activité autour de l’éclairage extérieur, fabricants de luminaires, guirlandes festives et systèmes de pilotage.
> Toujours pas de révolution d’usage. Le discours reste encore fortement centré autour du passage à la technologie LED afin de rapidement réaliser des économies d’énergie…et de bénéficier de subventions. Après la transition des lampes à décharge à la LED, à présent, la LED pilotée devient une réalité. Toutefois, la télégestion, avec son concept flou pour les usagers, prend encore le dessus . “On continue à maintenir la confusion entre la gestion et la supervision, la télégestion de chaque point restant présentée comme LA solution incontournable pour atteindre le facteur 4” estime Philippe Badaroux qui ne voit toujours pas la révolution d’usage se concrétiser.
> Des luminaires encore trop conservateurs. Les luminaires évoluent, mais demeurent assez conservateurs dans leur forme. On reste encore dans un marché de luminaires, pas d’éclairage intégré dans des nouvelles stratégies urbaines avec, toutefois, une mention particulière aux “Salons Nocturnes” proposés par Ragni, en collaboration avec le concepteur lumière Roger Narboni (voir la Une de la Lettre Lux du 21 novembre dernier). Hormis cette proposition, cette dynamique ne s’affiche pas encore. Bon nombre de produits présentés étaient équipés de LED chaudes 2200K “comme si les fabricants avaient anticipé une pensée unique concernant la pollution lumineuse
A noter le “retour” de sociétés, notamment européennes, telles, par exemple, la centenaire espagnole Carandini (avec la présentation de son luminaire urbain “Urbalite”) et l’italienne AEC Illuminazione, qui s’intéressent plus fortement au marché Français.
> Une certaine défiance. Tous les grands installateurs étaient présents dans la pavillon 3 “Energie & Climat” (Citeos, Spie, Eiffage, Bouygues Energies & Services – Equans), Firalp, Ineo, Fayat Energie Services… Était perceptible une certaine défiance de la part des installateurs et des fabricants de luminaires vis à vis des syndicats d’énergies que certains taxent triplement: un peu trop invasifs; peu de place laissée à la créativité; participent à la chute des prix (NDLR: voir ci-dessous).
> L’interopérabilité des systèmes de pilotage questionne. Chaque fabricant de luminaires d’éclairage public propose sa propre solution de pilotage. Dans quelle mesure est-elle interopérable avec celles des confrères ? Le discours dit que oui…Et la réalité ?
Étaient présentes plusieurs entreprises focalisées sur le pilotage des éclairages pour les rendre adaptatifs. Ces sociétés transverses, indépendantes des fabricants de luminaires, (Lacroix, BH Technologies, Citylone, et quelques nouveaux entrants dont Philippe Badaroux considère les propositions pas assez réalistes) proposent des solutions souvent « idéales » mais qui restent encore éloignées des contraintes opérationnelles et de maintenance. “Comme quoi la technologie se doit d’intégrer les attentes des clients” souligne-t-il.
> Quelques retours d’expérience négatifs. Ceux-ci portent sur la fiabilité des luminaires LED installés sur des réseaux d’alimentation “chahutés”, notamment dans les DOM TOM, le taux de défaillance des drivers étant assez élevé en l’absence de régulateurs de tension. Perdure un dialogue de sourd entre fabricants et exploitants qui se renvoient la balle et avec Enedis qui ne respecterait pas ses obligations normatives… ce qui reste impossible à prouver.
Encore une fois, considère Philippe Badaroux, il est démontré que la norme n’est pas l’outil absolu pour garantir la fonctionnalité. Il faut savoir aller plus loin pour intégrer l’usage spécifique. Comme quoi les drivers restent encore le maillon faible des nouvelles solutions.
> La morosité ne circulait pas dans les allées…mais. Le secteur “éclairage” du SMCL a témoigné d’une activité générale dynamique ne laissant pas place à la morosité. Toutefois, regrette Philippe Badaroux, la profession reste encore trop dans une extrapolation du « monde d’avant », les discussions tournant toujours autour des produits, peu autour des solutions et “sans aborder un urbanisme lumière repensé dans une approche plus systémique” conclut-il en anticipant donc du travail en perspective.
(1) Un visitorat principalement composé de donneurs d’ordre, de services techniques des collectivités et de commerciaux indépendants
(NDLR) Tout porte à croire que réponses sera apportée lors du Forum FNCCR “Eclairage Public intelligent et connecté; c’est déjà le futur” organisé, le 7 décembre prochain, à Paris (Espace du Centenaire).
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