Couchers de soleil lorrains

Non loin du Luxembourg, un nouveau pôle culturel vient animer la ville de Villerupt, en Meurthe-et-Moselle, dont le cœur battant était autrefois l’industrie métallurgique. Cette arche de béton brut a été imaginée par l’agence K Architectures qui avec un budget réduit s’est emparée également de la conception de l’éclairage. Avec une création à la clé : le lustre Kandelabro.

Photos © Guillaume Amat
Photos © Guillaume Amat

Dans leur agence K Architectures, Karine Herman et Jérôme Sigwalt développent pour chacun de leurs projets une esthétique à l’écart de tout systématisme autoréférencé. Partant du plus près du site et surtout de  son  histoire, ils recourent à des  matériaux variés allant du bois au béton.  Dans leur quête « d’atemporalité », ils restent ouverts à toutes les possibilités que la création  architecturale  offre et rend possible. Ils ne sont pas avares non plus sur les références architecturales, antiques comme contemporaines. Et tout cela avec le souci de composer un ensemble cohérent, éclairage artificiel compris. Pas question d’en faire la dernière roue du carrosse. Et si aucun luminaire de catalogue ne leur convient, alors ils n’hésitent pas à se lancer dans l’aventure du détournement ou de la conception de luminaires.

L’ARCHE, PÔLE CULTUREL DE MICHEVILLE
À VILLERUPT (MEURTHE- ET-MOSELLE)
MAÎTRE D’OUVRAGE
Communauté de communes Pays Haut Val d’Alzette
ÉQUIPE DE MAÎTRISE D’ŒUVRE
K Architectures – Émilie Bourdier, architecte cheffe de projet
CALENDRIER
Conçu en 2016, achevé en 2022

UN ÉQUIPEMENT STRUCTURANT

« Villerupt est la ville centre d’un chapelet de communes bâties dans la vallée de l’Alzette. Ces voisines, réunies par la même histoire industrielle, sont désormais toutes liées à la demande massive de main-d’œuvre appelée par le Luxembourg. Ces  communes  se  sont  regroupées  dans un grand projet commun de dépolluer une vaste friche industrielle et d’y bâtir un nouveau quartier d’avenir. » Premier opus de cet ensemble, en attendant la création des logements, L’Arche, au programme riche. En témoigne son intitulé : « Équipement culturel, tiers lieu hybride à la rencontre des arts numériques, des industries créatives et des pratiques artistiques multiples. » Ils combinent une salle de spectacles configurable allant jusqu’à 1 140 places, un cinéma de 147 places, un bar- restaurant, un fablab, une galerie d’arts numériques immersive, ainsi que des studios d’enregistrement de musique.

Photos © Guillaume Amat
Photos © Guillaume Amat

LOW TECH ET DÉTOURNEMENTS

Compte tenu de la variété du programme et de la spécificité techniques de certaines salles, certains luminaires sont issus de catalogues. Mais l’attention de l’agence à la qualité et au rôle de la lumière les pousse à aller plus loin. « La lumière est l’une des matières de l’architecture, elle offre beaucoup de perspectives pour sculpter l’espace. Elle représente la deuxième forme après celle intrinsèque des bâtiments. Elle touche à l’immatériel », analyse Jérôme Sigwalt. Comme d’autres agences K Architectes prolonge son écriture architecturale avec ses propres projets de luminaires. « Ce sont des objets qui habitent l’espace et l’œuvre, avec une place à part entière », poursuit-il.

Photos © Guillaume Amat

L’Arche, volume de béton brut, abrite le nouveau pôle culturel de Villerupt. L’éclairage s’y décline en création de lustres Kandelabro à partir de simples tubes LED dans le hall, en utilisation des mêmes tubes LED dans les sanitaires et en détournement de rubans LED de chantier dans les circulations.

Photos © Guillaume Amat

Dans cette recherche de cohérence, elle a créé les lustres monumentaux Kandelabro, spécifiquement pour le hall d’accueil. « Deux modèles, l’un d’apparence concave et l’autre convexe, sont conçus suivant une technicité proche des structures utilisées en scénographie. Leur armature est en acier brut et les assemblages sont relativement low tech. Des gélatines de spectacle enrobent les lampes pour colorer la lumière dans les tons dominants d’un coucher de soleil Lorrain. » Faute de trouver des LED produisant des couleurs satisfaisantes, les concepteurs ont sorti le nuancier de gélatine pour obtenir ces effets… et répondre à la réglementation qui interdit de dépasser les flux minimums dans ce type d’espace. De dimensions allant de 2,5 à 2,9 mètres de diamètre, ils composent avec l’escalier une pièce en cinq actes. Le souhait de leurs créateurs est de les voir éditer.

Ailleurs dans les circulations l’éclairage est assuré par des guirlandes de chantier, des rubans LED pour lesquels des platines d’interrupteurs ont été adaptées pour créer le système d’accroche mural. Une touche festive à coût réduit. La force du détournement. Côté extérieur, le bâtiment a été imaginé comme un belvédère depuis lequel des installations lumineuses à l’échelle du paysage pourront être diffusées.

Lucie Cluzan

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