Condé-sur-l’Escaut devance l’arrêté sur les nuisances lumineuses

Depuis le 1er janvier 2019, le dispositif législatif visant à limiter les nuisances dues à l’éclairage extérieur s’est encore renforcé. Pour autant, les collectivités territoriales n’ont pas toujours attendu la législation pour faire des efforts dans ce sens. Exemple avec Condé-sur-l’Escaut, dans le Nord, qui s’est déjà engagée, avec Citeos, dans un CPEassocié à une trame noire.

Depuis le 1er janvier dernier, l’arrêté du 27 décembre 2018 relatif à la prévention, à la réduction et à la limitation des nuisances lumineuses est entré en application. Il complète et remplace l’arrêté de 2013 sur le sujet et fixe de nouvelles plages horaires pour l’extinction des lumières, impose de nouvelles normes techniques à respecter en agglomération et hors agglomération, ainsi que dans des espaces naturels protégés (répartition du flux lumineux sur une surface donnée, température de couleur…). Il introduit aussi un volet de contrôle pour que la conformité des installations d’éclairage puisse être vérifiée (historisation de données sur l’intensité lumineuse, date de mise en fonction, puissance électrique du luminaire…).

Les collectivités territoriales ne peuvent désormais plus ignorer le volet biodiversité dans la gestion de l’éclairage public. Condé-sur- l’Escaut, en région Hauts-de-France, n’a pas attendu pour agir dans ce sens. Signataire de la convention Territoire à énergie positive pour la croissance verte (TEPCV), cette commune de 9 600 habitants, dont les fortifications impressionnèrent Louis XIV et inspirèrent Vauban, est située en bordure du parc naturel régional Scarpe-Escaut (le plus ancien des PNR français). Volontariste, la Ville s’est engagée dans la mise en place d’un CPE associé à celle d’une trame noire. Objectif : conjuguer optimisation de l’éclairage public et architectural et préservation d’une biodiversité encore très dense sur ce territoire. Accompagné en AMO par Hexa Ingénierie, Gregory Lelong, le maire de Condé- sur-l’Escaut, a choisi Citeos pour la mise en œuvre de ce projet.

L’idée, pour répondre à ce double objectif ? Optimiser l’éclairage de toutes les « frontières » entre la ville et les espaces naturels qui la bordent, notamment la base de loisirs nautiques Chabaud- Latour, dont les activités portent d’importants enjeux économique et social.


Pour concilier les exigences du CPE et celles d’une trame noire, une stratégie a été contractualisée entre Condé-sur-l’Escaut et Citeos. Elle se résume en trois axes d’intervention : maîtrise des flux, choix de la température de couleur et mise en place d’une gestion par détection de présence.

© Condé-sur-l’Escaut
© Condé-sur-l’Escaut

TROIS AXES STRATÉGIQUES

Un diagnostic initial a permis de comptabiliser 1 800 points lumineux, obsolètes pour la plupart, et 200 lampes à vapeur de mercure encore en service malgré la directive 2009/125/CE qui a banni cette technologie en 2015. « Si la commune dispose de luminaires neufs, plus de 50 % sont vétustes et posent un fort enjeu d’économies d’énergie à la clé du contrat d’efficacité énergétique, explique Alain Grisval, de Citeos. Pour concilier les exigences du CPE et celles d’une trame noire, une stratégie a été contractualisée qui se résume en trois points : les flux, leur température de couleur et la détection de présence. » Comme à chaque fois qu’est abordé un sujet systémique tel que l’éclairage public, il faut commencer par définir l’usage ; celui des axes circulés en l’occurrence : voies principales, résidentielles, accès à un parking, à une installation sportive ou de loisirs… À partir de là, poursuit Alain Grisval, « des propositions “idéales” sont émises pour servir de base au dialogue avec le maître d’ouvrage et trouver le meilleur compromis ». En ce qui concerne la base de loisirs, par exemple, les luminaires ont un flux très orienté qui ne « déborde » pas sur l’eau. « Cette exigence demande un vrai travail d’éclairagiste, et impose de facto des luminaires permettant d’ajuster précisément la photométrie. »


ARRÊTÉ SUR LES NUISANCES LUMINEUSES GRAND CHAMBARDEMENT DANS L’ÉCLAIRAGE EXTÉRIEUR

La publication de l’arrêté du 27 décembre 2018 relatif à la prévention, à la réduction et à la limitation des nuisances lumineuses a fait l’effet d’une déflagration pour les professionnels de l’éclairage extérieur.

En quatre pages, il pose des obligations de moyens et de résultats qui vont sensiblement modifier les pratiques de la filière.

Au-delà d’une catégorisation des fonctions de l’éclairage extérieur qui va contraindre les maîtres d’ouvrage à revoir la classification de toutes leurs installations, les prescriptions de conception (Art. 3) constituent incontestablement le noyau dur du texte avec quatre points techniques majeurs : la maîtrise des flux (bornés par un URL < 1 % en conception et < 4 % à l’installation) ; la prise en compte des « codes flux » de la CIE 3 pour maintenir 95 % du flux lumineux émis vers le bas dans un angle imposé (75,5°), ce qui va avoir un impact sur les inter distances ; une température de couleur limitée à 3 000 K, ce qui va modifier l’efficacité énergétique de l’éclairage urbain, et une densité surfacique du flux qui limite la puissance lumineuse distribuée. Les luminaires installés à partir du 1er janvier 2020 devront être conformes à l’ensemble des dispositions. Pour les luminaires existants, l’entrée en vigueur varie selon la disposition et le type de luminaire mais le temps presse : l’arrêté statue, par exemple, une mise en conformité de la prescription relative à l’ULR au 1er janvier 2020 pour toutes les installations existantes pouvant être réglées. Suite à la web conférence que l’Association française de l’éclairage a organisée le 22 janvier sur ce sujet, La Lettre Lux Tendances techno n° 11, du 12 février, revient sur les points les plus discutés de cet arrêté.

Pour consulter Les Lettres LUX Tendances techno : lux-editions.fr/lux-la-revue-de-leclairage/

En matière de température de couleur, il a fallu dialoguer car plus elle est froide plus elle est efficiente énergétiquement, mais plus elle « dérange » la vie des espèces nocturnes. Pour les cheminements en lisière de forêt et de zones aquatiques, un blanc 2 700 K a été privilégié bien que la performance énergétique soit moindre de plus ou moins 25 % par rapport à une température de couleur plus froide. Ce blanc chaud reste confortable pour les usagers – c’était un point important – et permet de limiter la longueur d’onde bleue du spectre lumineux, très perturbatrice pour la faune nocturne.

Et parce qu’il s’agissait aussi, dans le cadre de ce CPE, d’éclairer « quand il faut », une gestion de l’éclairage par détection de présence a été mise en place dans les zones périphériques relativement peu empruntées à la nuit tombée. Le choix s’est porté sur des détecteurs PIR (détection par écart de température) combinés à un système doppler (détection par ultrasons), pour une analyse fine et une exploitation optimale. Ajoutons pour finir que les armoires électriques feront l’objet d’une mise à niveau « au fil de l’eau ». Pour assurer la réussite de ce projet, une communication interactive est assurée avec les Condéens par le biais d’une application logicielle.« Ces échanges en ligne risquent de faire remonter plus de points de mécontentement que d’avis favorables, reconnaît Alain Grisval, mais cela donne à la commune les moyens de bien faire comprendre les enjeux de l’éclairage public et de la biodiversité. »

Pascale Renou


58 % D’ÉCONOMIES D’ÉNERGIE

Le projet de Condé- sur-l’Escaut se chiffre à 1,37 M€. Le CPE a été signé pour huit ans. La commune a investi 316 000 €, dont 120 000 € éligibles à la subvention TEPCV, via le Parc naturel régional dans le cadre de la trame noire. L’objectif du CPE est d’atteindre 58 % d’économies d’énergie à terme. Une obligation de résultat (principe du CPE) qui permet de rassurer les maires parfois hésitants face à des engagements contractuels qui vont bien au-delà de leur mandature.

À noter que la commission Éclairage public du Serce a édité un Guide des dispositifs de financement à destination des élus téléchargeable gratuitement sur le site du syndicat.

TRAME NOIRE DE CONDÉ-SUR- L’ESCAUT, NORD
MAÎTRISE D’OUVRAGE
Ville de Condé- sur-l’Escaut
ASSISTANCE À MAÎTRISE D’OUVRAGE
Hexa Ingenierie, Douai
MAÎTRISE D’ŒUVRE
Citeos Ingénierie Nord

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