Le NEW DEAL des constructeurs
L’ampleur de l’impact économique de la crise sanitaire liée à la Covid-19 aura eu un effet inattendu en matière d’efficacité énergétique : la mise en place de plans de relance par la puissance publique à l’échelle nationale et européenne. Ces derniers feront la part belle à la rénovation énergétique des bâtiments tertiaires, publics et privés, à usage professionnel. « Mais quelle place tiendra l’éclairage parmi ces initiatives politiques ? », s’interroge Lionel Brunet, délégué général du Syndicat de l’Éclairage.
La France y a déjà répondu, en annonçant, prioritairement, le déblocage sur 2 ans, (2021 et 2022), d’une enveloppe de 4 milliards d’euros dédiés au financement de la rénovation énergétique des bâtiments publics avec pour triple objectif : la diminution de la facture énergétique ; le gain de confort pour les usagers et les agents ; la réduction de l’empreinte environnementale. Au sein de ces 3 types d’opérations éligibles à ce financement, « l’éclairage est notamment cité dans les quelques actions reconnues à gain rapide présentant un fort retour sur investissement », souligne Lionel Brunet, en précisant que « cette reconnaissance est aussi le fruit de notre campagne menée tant en France, auprès des responsables en charge du climat, qu’au niveau européen, pour s’inscrire dans la Renovation Wave, initiative proposée par la Commission européenne », avec pour unique slogan : « Pas de rénovation énergétique sans rénovation de l’éclairage. »
Dans son site de stockage de la Villouët, à la Gacilly, Yves Rocher a souhaité réduire la consommation d’énergie tout en favorisant le bien être des opérateurs. Trilux a apporté réponse.
En effet, rénover son éclairage caractérise la première étape d’un projet de rénovation énergétique. Non seulement parce que l’éclairage représente 20% en moyenne de la consommation électrique du tertiaire, « mais parce que c’est un projet en lui-même indépendant de la rénovation thermique qui nécessite une approche globale ».
PRÉPARER LA MISE EN ŒUVRE DE LA RÉGLEMENTATION D’ÉCOCONCEPTION
Cette campagne promeut, également, au niveau de la rénovation énergétique des bâtiments tertiaires, l’installation de luminaires équipés de sources lumineuses LED en combinaison avec système de gestion comprenant des capteurs communicants embarqués. « Les économies à la clé représentent près de 90 %, mesurées en gains d’efficacité énergétique » et comme indiqué dans le rapport VHK commandé par la Cour des comptes européenne, le 3 septembre 2015, pour préparer la mise en œuvre de réglementation d’écoconception qui entrera en application le 1er septembre 2021. « Cette intelligence embarquée tient compte de l’occupation des locaux et comprend un asservissement à la lumière du jour par gradation automatique de l’éclairage artificiel », souligne Lionel Brunet.
INCOHÉRENCE RÉGLEMENTAIRE
Ces plans de relance s’inscrivent naturellement dans les objectifs du décret tertiaire1 exigeant un niveau minimum de performances énergétiques pour les principaux usages du bâtiment. À l’horizon 2050, en France, une réduction de 60 % de la consommation énergétique finale du parc tertiaire public et privé est attendue, avec déjà un objectif intermédiaire, pour 2030, visant une baisse de 30 %.
Quant à l’obligation des articles 42 à 46 concernant l’éclairage de l’arrêté du 3 mai 20072, modifié le 27 mars 2017, s’exprime simplement de la manière suivante : « La puissance installée pour l’éclairage général dans une rénovation doit être au plus de 1,6 watt par mètre carré par 100 lux d’éclairement moyen. » Toutefois, note Lionel Brunet, « il convient de regretter une incohérence réglementaire ». En effet, en matière de constructions neuves, le niveau d’exigences reste diffus et non explicite pour l’éclairage. « Cependant, dans tous les cas, ce niveau est inférieur à celui de la rénovation. »
INDÉPENDANCE
Julien Arnal, président du Syndicat de l’éclairage, ne cesse de le répéter : « L’éclairage doit être indépendant de la rénovation énergétique que certains souhaitent globale. » En effet, ajoute-t-il, lorsque le poste d’éclairage est inclus dans les dépenses de rénovation énergétiques au niveau globales, le calendrier et les financements, sont plus compliqués.
« Et pourtant, on sait que la rénovation de l’éclairage seule contribue à une économie immédiate de 10 % de la facture d’électricité totale du bâtiment, hors process. Donc il faut rénover en priorité l’éclairage. »
Par ailleurs, rappelle-t-il, dès 2021, au plus tard le 30 septembre de chaque année, toutes les entités occupant un bâtiment tertiaire de plus de 1 000 m2, doivent renseigner leurs données de consommation énergétique sur la plateforme OPERAT (Observatoire de la performance énergétique de la rénovation et des actions du tertiaire, operat.ademe.fr) gérée par l’Ademe, en ayant choisi au préalable leur année de référence entre 2010 et 2019. « On déplore de ne pas avoir une identification précise des consommations de l’éclairage au sein des autres postes de consommation », conclut Julien Arnal, souhaitant vivement voir cette demande prise en compte.
LES BÉNÉFICES AU NIVEAU DU CONFORT ET DU BIEN-ÊTRE
Enfin, en matière de confort et de bien-être des nombreux salariés et des utilisateurs de ces bâtiments, cette rénovation, caractérisée par des luminaires intelligents, procure un co-bénéfice avec la promesse de bénéficier des dernières avancées en matière de chronobiologie et des effets bénéfiques reconnues de la qualité de la lumière tant sur le plan visuel qu’émotionnel. Aussi, « outre la réduction des fatigues et insuffisances visuelles, seul un luminaire à LED vous permettra, où que vous soyez, et quand vous le souhaitez, de bénéficier de ces fonctions d’adaptation de l’éclairage, quels que soient votre propre besoin, le moment de la journée, l’environnement de votre lieu de travail, ou la concentration requise, avec en final une sensation de bien-être », conclut Lionel Brunet.
JD
1Rappelons que, entré en vigueur en octobre 2019, le décret n° 2019-771, du 23 juillet 2019, précise les modalités d’application de la loi ÉLAN (Évolution du logement, de l’aménagement et du numérique) portant sur les objectifs de réduction de la consommation énergétique des bâtiments français à usage tertiaire.
2 Relatif aux caractéristiques thermiques et à la performance énergétique des bâtiments existants.
CEE : LA FICHE BAT-EQ-127 MÉRITE DÊTRE ACTUALISÉE Introduit par la loi sur l’énergie du 13 juillet 2005 (dite loi POPEProgrammation fixant les Orientations de la politique énergétique), le dispositif des CEE (Certificats d’économies d’énergie) a, rappelons le, pour but de réaliser des économies d’énergie, principalement dans le bâtiment, mais aussi dans la petite et moyenne industrie, l’agriculture ou les transports. « Ce dispositif repose sur une obligation de réaliser ou de faire réaliser aux consommateurs des économies d’énergie », rappelle François Darsy, président de la commission Éclairage intérieur du Syndicat de l’éclairage. Imposés par les services du ministère chargés de l’énergie aux obligés et acteurs éligibles, ces CEE sont comptabilisés en kWh cumac (kWh d’énergie finale économisée, cumulé et actualisé sur la durée de l’action). Pour chaque opération, une fiche CEE définit les conditions d’éligibilité, ainsi que le montant forfaitaire en kWh cumac. Trois fiches concernent les installations d’éclairage : la BAT-EQ-127 (luminaire d’éclairage général à modules LED), lIND-BA-116 (luminaires à modules LED pour l’industrie et l’agriculture), la RES-EC-104 (rénovation de l’éclairage extérieur). « Pour la rénovation des éclairages intérieurs, la fiche BAT-EQ-127 reste un outil pertinent », se félicite François Darsy, en considérant, toutefois, qu’elle nécessite quelques adaptations pour devenir « un puissant accélérateur de la transition éclairagiste ». À savoir : modification des critères d’éligibilité (simplification de la notion « durée de vie » et suppression du critère > 3 000 lm qui élimine bon nombre d’applications) ; alignement de la preuve de conformité avec les déclarations CE avec la suppression de la mention de l’archivage systématique des rapports d’essais par le demandeur ; adjonction d’un secteur logistique avec des intensités d’usage plus élevées… car actuellement comptabilisées comme pour les locaux de bureaux ou d’enseignement, donc d’usage trop faible. « L’usage des CEE, très dépendant de la valeur du marché des kWh cumac, s’est révélé, depuis 2017, être un puissant moteur de la transition énergétique. L’actualisation de la fiche BAT-EQ-127 ne peut qu’améliorer encore cette tendance », conclut François Darsy. À suivre donc… |