L’économie circulaire droit devant

Le sujet portant sur l’économie circulaire intrigue, énerve, inquiète mais ne laisse pas indifférent. De nouvelles réglementations, déjà votées, se mettront en place progressivement. D’autres sont en préparation, tant au plan Français qu’Européen. « Bref, l’économie circulaire est en marche », explique Jean-Marie Croué, délégué général du GIL – Syndicat du luminaire, en faisant le point sur ce sujet.

Si de nombreux acteurs du marché de l’éclairage, fabricants et utilisateurs, ne sont pas encore familiarisés avec l’économie circulaire, d’autres se la sont déjà appropriée. Ils en ont fait un argument commercial « produit » ou la marque de l’engagement de leur entreprise en matière de développement durable.

QUESTIONS PRÉALABLES

« Nous conviendrons tous que nul ne peut vanter haut et fort les qualités “économie circulaire” de ses luminaires sous réserve que les caractéristiques louées soient vérifiables et déterminées, calculées, à l’aide de référentiels établis », considère Jean-Marie Croué en prenant quelques exemples :

  • Mon luminaire à de faibles impacts environnementaux ! Avec quel référentiel avez-vous calculé ses impacts ? Quel logiciel utilisez-vous pour réaliser ces calculs ? Est-il conforme aux normes ISO 14040 et ISO 14044 ? À quelle base de données environnementales êtes- vous abonné ? Quelle unité fonctionnelle avez-vous retenue ? Vos calculs ont-ils été vérifiés par une tierce partie ?
  • Mon luminaire est réparable ! Par qui ? Par un utilisateur néophyte ? Par un professionnel ? Dans votre usine ? Quelle partie du luminaire est réparable ? Quelles sont les pièces détachées disponibles ? Pendant combien de temps ? Quel est le prix des réparations ?
  • Mon luminaire est éco-conçu ! Comment pouvez-vous l’attester ? Quelles sont ses performances environnementales ? De quel pourcentage de matières recyclable est-il composé ? Quelle proportion de matière recyclée contient-il ? Comment avez-vous calculé ces données ?

« Il est pour l’instant très difficile de jauger de la véracité des dires des uns et des autres », regrette Jean-Marie Croué, en préférant tout d’abord s’intéresser aux obligations réglementaires existantes ayant trait au respect de l’environnement et auxquelles toutes les entreprises devraient se conformer.


CONTINUER À LUTTER CONTRE LA CONCURRENCE DÉLOYALE

Les sujets ne manquent pas et sont passionnants et complexes. Ils vont engendrer de nombreux coûts pour les entreprises. Le GIL – Syndicat du Luminaire mettra tout en œuvre pour que le « coût de la mise en conformité » reste raisonnable. « Nous continuerons, encore plus qu’hier, à essayer de faire bouger la Commission Européenne et le gouvernement français pour qu’une véritable surveillance du marché soit mise en place et que la concurrence déloyale des acteurs de l’internet cesse enfin », promet Jean-Marie Croué.

LES RÉGLEMENTATIONS EXISTANTES

Deux directives principales s’appliquent à l’économie circulaire pour les luminaires :

  • d’une part, la Directive DEEE 2012/19/UE. Une entreprise peut-elle mettre en avant l’écoconception de son luminaire ? Un utilisateur peut-il se féliciter d’appliquer une politique d’achat responsable si le premier n’est pas adhérent d’un éco-organisme et si le second ne vérifie pas que ses fournisseurs le sont ? Pour mémoire les fabricants doivent obligatoirement adhérer à un éco-organisme dans tous les pays européens où ils commercialisent leurs luminaires. Cette adhésion peut être faite pays par pays ou globalement auprès de WEE Europe (www.weee-europe.com).
  • d’autre part, la Directive RoHS 2017/2102/UE et 2011/65/UE. Il en est de même pour la présence de plomb, de mercure et de cadmium dans les luminaires, ces matières étant dangereuses pour l’être humain et pour son environnement. Un luminaire se doit d’abord de ne pas être dangereux avant d’être  éco-conçu  ! Les fabricants fournissent-ils les procès-verbaux de conformité RoHS à leurs clients (NF EN 62321) ? Les utilisateurs les demandent-ils ?

Pour mémoire les fabricants doivent obligatoirement adhérer à un éco-organisme dans tous les pays européens où ils commercialisent leurs luminaires.

LES RÉGLEMENTATIONS À VENIR

Par ailleurs, plusieurs réglementations futures seront à appliquer :

  • la Single Lighting Regulation (Règlement Européen 2019/2020/UE), en septembre 2021 ;
  • les différents décrets d’application de la loi française du 10 février 2020 relative à la « Lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire » ;
  • les nouvelles réglementations européennes issues du nouveau CEAP (Circular Economy Action Plan) une fois que les votes au Parlement européen auront eu lieu.

Ces futures réglementations comporteront des exigences concernant la réparabilité, l’indice de réparabilité, l’indice de durabilité, l’incorporation de matières premières recyclées dans les produits (plus particulièrement le plastique), la recyclabilité des matières premières incorporée dans les produits ainsi que l’indice de recyclabilité.

À noter que les exigences du gouvernement français et de la Commission Européenne ne sont pas encore toutes établies pour les luminaires. Toutefois, les normes permettant de se conformer aux exigences, qui seront fixées, existent. Elles sont toutes en phase finale d’élaboration (PR EN 45550 à 45559).

« Le volet des exigences actuelles, liées au respect de l’environnement et de la mise en place de l’économie circulaire, est donc très large. Il représente donc déjà un défi pour les acteurs de s’y conformer », poursuit Jean-Marie Croué.


L’économie circulaire
Telle que proposée par l’Ademe, avec 3 domaines et 7 piliers. Le processus de production ne suit plus un schéma linéaire classique mais un circuit.

ALLER ENCORE PLUS LOIN

Pour s’engager plus en avant dans une démarche « économie circulaire » spécifiques aux luminaires, l’ensemble des fabricants disposent de luminaires LED intelligents minimisant les consommations électriques, donc les émissions de CO2. La technologie LED et le pilotage intelligent, de plus en plus présents dans les luminaires, génèrent déjà d’effectives économies d’énergie. « Mais nous nous devons d’aller encore plus loin », estime le DG du GIL – Syndicat du luminaire pour qui l’engagement dans l’économie circulaire ne peut se mesurer objectivement qu’à travers de nouveaux éléments tels que :

  • la mesure de l’impact environnemental du luminaire. C’est-à-dire un PEP (profil environnement produit) effectué selon la norme XP C08 100_1 (www.boutique. afnor.org). Il est également possible d’utiliser le PSR luminaire PSR 014 (GIL – Syndicat du luminaire et Syndicat de l’éclairage (www.pep-ecopassport.org). À noter qu’il est souhaitable et recommandé de faire contrôler le PEP par une tierce partie et publié dans la base INIES (https://www.inies.fr/equipements-du-batiment/);
  • la mise sur le marché de luminaires réparables en exprimant clairement par qui ce dernier est réparable (l’utilisateur néophyte, l’installateur ou un service de maintenance, le retour en usine) et en s’engageant sur la disponibilité des pièces détachées dans le temps ainsi que sur le coût des réparations (Pr EN 45554) ;
  • l’utilisation de matières premières recyclables et recyclées (Pr EN 45555 et Pr EN 45556). Pour le reste les enjeux sont collectifs et l’ensemble de la filière doit se mobiliser pour réfléchir au moyen de mettre à disposition les pièces détachées nécessaires aux réparations ainsi qu’à la mise en place de l’agrément de réparateurs capables d’intervenir sur les luminaires. Elle doit également mener une réflexion sur le marché du luminaire d’occasion. Seul l’engagement d’un nombre important d’acteurs dans cette démarche permettra la mise en place de partenariat avec des réseaux de vente de produits de seconde main.    

Jacques Darmon

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