Depuis 30 ans, le Concours Lumières témoigne que l’éclairage nocturne se réinvente

ANNE VALACHS (SERCE)

L’éclairage joue un rôle essentiel dans l’attractivité et l’animation des territoires. Depuis 30 ans, en témoigne le « Concours Lumières » organisé par le Serce, en partenariat avec Signify (ex-Philips). Avec pour ambition de valoriser des réalisations de mises en lumière exemplaires, sa longévité est riche d’enseignements.

© Arthur Pequin

Le Chai Ballande à Ludon-Médoc en Gironde mis en lumière par Yon Anton-Olano a été primé en 2004. Le concepteur a intégré en façade dans les trous de banche 278 points lumineux.

Intelligemment pensée et gérée, la mise en valeur du patrimoine, quelles que soient sa nature et son envergure, représente un atout supplémentaire pour toutes les communes, indépendamment de leur taille. » Anne Valachs, Directrice générale du Serce (Syndicat des entreprises de génie électrique et climatique). Elle invite ainsi tous les maîtres d’ouvrage, publics ou privés, ayant réalisé une mise en lumière pérenne et visible gratuitement, à participer au Concours Lumières.

Au total, environ 150 mises en lumière récompensées en 30 ans témoignent de l’efficacité de l’éclairage pour redonner de la cohésion sociale à des espaces urbains souvent mal identifiés. Ces mises en lumière de monuments, sites urbains ou ruraux, jardins ou ensembles paysagers, à la fois historiques et contemporains, contribuent, également, à l’attractivité touristique. Elles participent à l’attractivité économique des territoires, tant à l’échelle d’un site que d’un quartier ou même d’une ville. Trente années de concours ont démontré que l’éclairage nocturne s’est considérablement réinventé.

LA LUMIÈRE RECRÉE AUSSI UN LIEN SOCIAL

« En analysant le panorama des lauréats, on s’aperçoit que l’utilisation et le rôle joué par la lumière ont beaucoup évolué en 30 ans », souligne Anne Valachs. À l’origine, il s’agissait surtout de « mettre en lumière ». On éclairait les monuments pour qu’ils soient considérés comme des phares dans la nuit. « Il fallait que cela se voie. » Puis, au cours des années 2000, l’éclairage a gagné en subtilité tandis que la couleur a pris une place importante dans les réalisations. À partir de 2006, le jury a intégré la notion d’efficacité énergétique pour faciliter des réalisations performantes sans être énergivores.

Les innovations technologiques qui suivront, notamment l’apparition de la technologie LED, ont permis une nouvelle évolution dans la mise en valeur du patrimoine. La lumière, en s’appliquant directement sur l’édifice, vient sculpter les monuments, elle en souligne les contours ou les éléments architecturaux caractéristiques. Le flux lumineux est mieux maîtrisé et, tout en changeant la physionomie des bâtiments, il réduit les nuisances lumineuses. Sur le plan environnemental, des critères ont également été introduits pour juger les efforts d’intégration au site des sources lumineuses et des équipements afin de limiter leur impact visuel, de jour comme de nuit. Le concours a aussi évolué dans ses choix. Au début des années 2000, il sort du patrimoine traditionnel (églises, châteaux, mairies…) pour s’intéresser au patrimoine industriel. Des ponts, une grue, un haut fourneau deviennent lauréats. Des dossiers portant sur des bâtiments contemporains sont également proposés avec des réalisations surprenantes comme l’entrée du cimetière du parc de Clamart, un chai dans le Bordelais ou la bibliothèque de la Part Dieu à Lyon. Ces dernières années, le Concours a également récompensé des projets portant la qualité de leur éclairage, mais aussi pour la contribution sociétale du projet.

© Antoine Monié / Citéos
La base sous-marine de Saint-Nazaire mise en lumière par Virginie Nicolas. Pour ce troisième prix de 2015,
l’enjeu était de rendre le site plus attractif de nuit.

LE RÔLE DE LA LUMIÈRE ÉVOLUE

Bien sûr, il s’agit toujours de mettre en valeur un patrimoine, mais tout en contribuant au renouveau économique d’une ville. Deux exemples en témoignent notamment : d’une part, la vallée des usines, à Thiers, dont la mise en lumière, en rappelant l’histoire de la ville, génère une fréquentation touristique importante ; d’autre part, le parcours lumière de Châlons-en-Champagne, sur le Nau et le Mau, faisant découvrir le patrimoine historique de la ville au fil de l’eau. La lumière recrée aussi du lien social. On notera par exemple l’éclairage de jardins à la Réunion, qui sécurise les lieux et permet aux habitants de se réapproprier des espaces délaissés. Celui de la base sous-marine de Saint-Nazaire est aussi particulièrement significaif. La mise en lumière permet une véritable transformation d’un univers de béton en un lieu d’expression culturelle. Ce qui peut paraître laid de jour, devient attractif la nuit… et, en conséquence, les habitants réinvestissement les lieux.

Enfin, l’exemple le plus récent est le premier prix attribué à la tour TR2, abritant 45 logements HLM, située quartier du Puchot, à l’entrée de la ville d’Elbeuf-sur-Seine, en Normandie. Dans le cadre de sa rénovation énergétique extérieure, la tour a été mise en valeur par « une pluie d’étoiles » descendant de son sommet. « Ainsi éclairée, cette tour, implantée dans un quartier autrefois stigmatisé autrefois, signale de façon poétique l’entrée de la ville… et rend ses habitants fiers d’y habiter », conclut l’architecte Olivier Fontes de Aguiar à qui l’on doit cette conception lumière.


Recréer un lien social avec le reste de la ville, en profitant de travaux de rénovation énergétique, tel était l’objectif de la mise en lumière de la Tour TR2 à Elbeuf-sur-Seine. Premier prix 2018.

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